Balade de la place du général de Gaulle à Évry Grand Bourg
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Mémoire sur Évry et son histoire :
Extrait : Le vieil Evry, ou Evry « village »
Les articles classés dans cette catégorie sont issus de la rubrique “patrimoine”, sauf un qui figure dans “mémoire”. C'est le charme de ces vieux quartiers, qui est mis ici en valeur. A Évry on appelle couramment cette partie « le village », sans que cela corresponde à une zone précisément délimitée.
Le quartier du village correspond en fait à ce qui était le cœur de Petit bourg, du temps où il n’y avait qu’un village. Jusqu’au début des années 90, d’ailleurs la mairie s’y trouvait. Le premier collège construit à Évry en 1970 s’appelle « Collège Le Village ».
Commençons par les bords de Seine : dans l’article ‘‘Le charme d’Évry au fil de l’eau’’ (n°4), des photos et des commentaires nous apprennent qu’on venait de loin s'y baigner au début du siècle. Aujourd'hui un parc a été aménagé tout le long et le club de plaisance créé en 1957 subsiste, tout comme le chemin de halage. On rappelle également qu’il s’agit d’un lieu « historique » : l’arrestation de Manouchian, le pont détruit par les allemands en 1944, et celui, flottant, qui avait permis au Général Patton de traverser la Seine. Ainsi « les bords de Seine ravivent la mémoire », nous dit l’article.
L'écluse (article “Sous l'écluse coule la Seine”, n°29) construite en 1906, et dont la passerelle longue de180 mètres enjambe majestueusement la Seine, rajoute de l'intérêt à ce lieu privilégié. Les nombreuses péniches qui l'utilisent constituent un spectacle supplémentaire pour les promeneurs. La gare dont il est question à plusieurs reprises se rattache à ce passé nostalgique: “une des plus anciennes gares de France à Évry” en activité depuis 1840, “qui a gardé un cachet authentique des premières gares qui bordaient la ligne de chemin de fer de la compagnie Paris - Orléans” et dont l'aspect n'a pas changé comme en témoignent deux photos noir et blanc.
Ensuite les articles “Au fil des rues” et “La petite histoire de nos rues”, dont on nous précise qu'ils ont été réalisés grâce à “l'active participation de la société Historique et archéologique d'Évry et du Val de Seine”, sont l'occasion d'un véritable cours d'histoire bien documenté : il y est question de Decauville, qui au 19ème siècle possédait un « immense domaine » qui compte « une quantité prodigieuse d'essences, dont bon nombre font la renommée du parc » et du château dont cette famille a été propriétaire.
La toponymie est utilisée pour rappeler “la vocation vinicole d'un quartier rural avant tout”. Le vin, patrimoine français par excellence n’est pas oublié : « la rue des vignes, qui atteste que nos villages d’Ile de France, Évry ne fait pas exception, produisaient du vin. Un site de versant, un bon ensoleillement, le vin d’Évry était de médiocre quantité, mais il suffisait aux besoins de la population. Grâce à la rue des vignes, le souvenir de cette piquette locale demeure ! ».
Cette référence au passé vinicole permet en quelques mots de rappeler qu’Évry a été un village, où la vie sociale s’articulait autour de traditions rurales et de valeurs populaires à travers lesquelles les ex-ruraux peuvent se retrouver. Elle parle aussi d’un temps convivial où l’on partageait la production locale.
Dans cet article, il est parallèlement question de “la seule résidence seigneuriale de notre commune à être restée intacte après le départ des allemands qui en avaient fait un lieu de repos pour les sous-mariniers”, la propriété de Beauvoir, devenue un centre de réadaptation professionnelle géré par la sécurité sociale.
Sur le sujet de la seconde guerre mondiale, il est rappelé le passage de l'armée du Général Patton en août 1944 par l'avenue large qui descend vers la Seine, avenue qui porte son nom.
La promenade continue par les anciennes rues de ce « village champêtre » avec les quelques belles demeures du 19ème qui donnent une idée de ce que fut Petit-Bourg.
Le plus ancien édifice est la première église de la commune qui date du 12ème siècle et qui “garde en son sein bon nombre de témoignages historiques”.
Mais le monument le plus prestigieux de la commune fut bien ce château, le château de Petit Bourg, dont il ne reste rien, mis à part des gravures et des photographies. L'article intitulé “1880-1956 : l'histoire d'Évry Petit-Bourg” fait référence à cette “demeure princière construite par madame de Montespan sur le domaine que lui avait offert le roi soleil”, vendue à plusieurs reprises, et transformée en colonie pénitentiaire (ce que l'article ne dit pas et qui est inconnu des évryens probablement parce que moins glorieux), avant d'être occupée et finalement incendiée par les allemands en 1944 lors de leur départ. L'article précise que “le château sera ensuite rasé et une grande barre y sera construit dans les années 50 ”.
Un autre lieu, beaucoup moins prestigieux, fait parler de lui : “la solitude”, lieu insolite où depuis 80 ans à l'abri des regards “discrètement la vie des sœurs de la Communauté Contemplative s'étire dans le calme et le recueillement». Un encart renseigne sur l'origine de cette communauté qui fait partie de la congrégation des religieuses de Notre Dame de Sion et dont le fondateur habitait une maison de campagne à Grand Bourg, hameau voisin dépendant de la commune de Petit Bourg. Aujourd'hui, “Notre Dame de Sion” est le nom d'une importante école privée dans cette rue.
Le côté plaisant de cet article intitulé ””La Solitude” au temps des confitures” vient du fait qu'il raconte une odeur dont on se souvient, “les effluves” des confitures qui ont émané durant plusieurs décennies de cet endroit jusqu'en 2000. En effet cette communauté devait assurer sa subsistance et “les sœurs, inscrites depuis 1937 au répertoire des métiers comme “confituriers, font des confitures une véritable activité professionnelle au service de leur vocation contemplative”. Un second article parle de la communauté : “Chapelle de la Solitude-Entre tradition et modernité-”, une nouvelle chapelle construite à l'emplacement des anciens bâtiments de stockage des pots de confiture ! L'article traite de cet édifice comme d'une œuvre d'art en faisant ressortir la modernité de sa conception architecturale. En particulier de très belles photos montrent des vitraux superbes en verre organique, un étonnant autel en laiton et une croix réalisée par le directeur des Ateliers d'arts plastiques de la ville. L'article se termine en précisant que le maire était présent lors de la consécration par l'évêque. Sans l’expliciter, l’article fait des liens entre les valeurs chrétiennes, l’histoire, la création artistique contemporaine, l’implication municipale et une histoire proprement évryenne.
Il est amusant de remarquer l’existence d’un article intitulé ‘‘Évry en 1905 !’’ dans le magazine n°33 très exactement au dos de l’article qui consacre 2 pages à la visite du pape. 1905 : Loi de séparation de l’église et de l’État. Mais cette loi n’est pas le sujet de cet article constitué essentiellement par trois photos en noir et blanc, « exhumées » et qui « racontent notre histoire, dont chaque Évryen est aujourd’hui l’héritier ». Qualifiée des adjectifs flatteurs de « prestigieuse » par ses six châteaux qu’elle a compté (« Évry : une généalogie aristocratique ? »), « industrieuse » grâce aux usines Decauville (la photo présente l’atelier de fabrication de machines-outils), et pour finir « joyeuse » : « Les enfants dansent sur la place de la fête aujourd’hui Place d’Armes [la guerre de 14-18 est passée par là…]. Cette scène illustre la permanence d’une tradition évryenne de convivialité où la jeunesse affirme sa présence au cœur du village, au cœur de notre ville ».
A remarquer : l’utilisation de l’adjectif ‘’notre’’ et l’affirmation naïve de l’existence d’une « permanence » d’une tradition dont on ne nous dit pas comment elle se manifeste de nos jours. Et l’on peut penser à ce qu’écrit M. de Certeau : « Le mémorable est ce qui peut être rêvé du lieu ».Le lecteur est ici invité à rêver…
Il y a aussi une confusion, ou une ambiguïté volontairement créée, entre le cœur de l’Évry-village et celui de la ville nouvelle. Jusqu’au début des années 90, la mairie construite à la création de la ville nouvelle se trouvait dans le vieil Évry. Désormais, géographiquement, le cœur, c’est-à-dire le centre de la ville nouvelle est organisé autour du nouvel Hôtel de ville, de la cathédrale, de l’université et de la gare d’ « d’Évry-Courcouronnes ». On voit bien ici une illustration de la problématique du concept de centre ville : qu’est-ce qui fait « centre » dans une ville ? A-t-on besoin de recourir au passé pour lui donner une légitimité ? Ce questionnement rejoint directement la question de l’identité de la ville, et donc la représentation qu’en ont les concitoyens.
On peut penser que ces articles s’adressent plus particulièrement à la partie la plus âgée de la population, sensibilisée à l’histoire ancienne, celle qui réside dans le secteur concerné par les articles en question, comme une façon de leur dire : on ne vous oublie pas, au milieu de la modernité il y a des choses qui perdurent, des belles propriétés, la culture religieuse, des valeurs comme celle du calme, de la tradition, de la ruralité. Ils mettent en valeur les rares vestiges d’un modeste patrimoine historique de la ville, et donne une image plutôt idéalisée d'un passé rural et aristocratique.
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