vendredi 29 juin 2012

Pourquoi je dirige


À la suite de l’article Les chefs de chœur : ils dirigent pourquoi ? comment ?, une choriste m’a demandé ce qui m’animait moi-même ; voici ce qui me vient d’abord à l’esprit.

Beaucoup de gens aiment chanter. Pour différentes raisons ils n’en ont pas la possibilité. Or pour eux le chant choral est une chance unique : sans une formation initiale particulière et au prix d’un effort raisonnable d’attention et d’assiduité, ils peuvent entrer rapidement de plain pied dans le monde du chant, c’est-à-dire évidemment aussi dans le monde de la musique ; parce que le chef de chœur leur montrera le chemin à suivre et parce que, se soutenant mutuellement dans leur chant, les choristes arriveront à des prouesses qu’ils n’auraient jamais imaginées en restant seuls.
Je suis profondément convaincu que, concernant le chant, les ressources des personnes sont immenses et surtout qu’elles dépassent de beaucoup ce qu’elles-mêmes peuvent imaginer. Le chef de chœur est donc, pour moi, celui qui faisant confiance à ces ressources (souvent même plus que les personnes elles-mêmes) n’aura de cesse de chercher à les mobiliser. Cela ne se fait pas tout seul, il faut du temps, il faut que chacun accepte tout doucement de se former. Mais le seul fait que chacun peut éprouver, d’une répétition à l’autre, un progrès, aussi minime soit-il, est un encouragement permanent à poursuivre l’œuvre entreprise. Au-delà du plaisir immédiat que procure toute activité musicale, il y a cette chose importante qui est le sentiment de progresser un peu chaque jour et, en fin de compte, d’entrer à chaque fois un peu plus dans le mystère de la musique ; en particulier en n’étant plus seulement un auditeur mais aussi un véritable acteur.
Car la musique est un mystère – que l’on se rassure : pour le chef de chœur aussi ! S’il peut se permettre de diriger un groupe de choristes, c’est parce qu’il détient seulement quelques clefs à partir desquelles il arrivera à les faire bien chanter ensemble, à produire une harmonie vivante. D’où lui viennent ces clefs ? De son travail personnel. Le chef de chœur commence par étudier attentivement chaque partition ; il essaye de l’entendre intérieurement, d’en être ému personnellement et de chercher les moyens par lesquels il pourra transmettre cette émotion à ses choristes ; cela c’est avant puis pendant les répétitions ; ensuite, lors du concert, ce sera aux choristes eux-mêmes de transmettre à leur tour leur propre émotion au public ; le chef de chœur est encore utile au concert, certes, mais beaucoup moins qu’aux répétitions : car c’est bien là que se pétrit très profondément la pâte qu’il ne restera plus qu’à servir au moment du concert.
Je pourrais dire, comme Laurence Équilbey : J’aime être un truchement pour transmettre les œuvres ; et en tout premier lieu pour les transmettre à chaque choriste, pour qu’il trouve sa place propre dans la réalisation d’une œuvre.
Plus largement, j’aime m’engager dans cette voie pas si facile qui consiste à participer à la promotion du chant choral ; cette chose me semble nécessaire dans la mesure où il s’agit, en France, d’une activité en fait assez mal connue. Voilà une des raisons de l’existence de ce blog – et par exemple de l’article : Pourquoi rejoindre une chorale ? Le chant choral ne mérite-t-il pas, en effet, d’être mieux connu ? Il est vrai que si l’on n’a pas vécu soi-même cette expérience de l’intérieur, il peut être difficile d’en imaginer tous les bienfaits. Je terminerai donc par ces mots de César Geoffray, ce grand précurseur : Lorsqu'on a goûté une fois l'agrément de ces moments étonnants d'efforts collectifs d'où émerge une émotion exceptionnelle que ne peuvent soupçonner les profanes, on s'engage pour toujours sur une voie de perfection ; alors à nous chefs de chœur de savoir susciter de tels moments.

2 commentaires :

  1. (et les choristes, pourquoi chantent-ils ?)
    A la lecture de ce texte, je me suis totalement retrouvée. Arrivée dans cette chorale depuis deux saisons, un peu par hasard, sachant seulement que j'aimais bien chanter, sans rien connaitre du monde de la musique, sans avoir jamais été écouter un concert de chorale. Quelle découverte ce fut ! Le travail de la voix, l'apprentissage du chant, l'énergie que cela demande et l'émotion que l'on ressent pendant un concert. Pas seulement l'émotion d'être devant un public mais l'émotion de toutes ces voix réunies, on ressent une vibration et un plaisir immense qu'on n'aurait jamais imaginé. Juste pour ces quelques instants de bonheur, le temps d'un concert, tous les efforts, tous les moments difficiles lors des répétitions, tout cela est oublié. Il ne reste que ces instants magiques de partage avec les choristes, le chef de choeur et le public. MERCI POUR TOUT CELA

    RépondreSupprimer
  2. L’expression des choristes, tout autant que celle des chefs de chœur est chose trop rare ; encore plus rares les lieux où les deux peuvent se croiser. Continuons donc à être attentifs aux paroles des choristes, aux paroles des chefs de chœur, et à ce qui peut leur permettre de communiquer.
    Concernant des paroles de choristes, j’en ai trouvé sur 2 sites :
    Chœur Régional Ile-de-France Chansons :
    http://www.crifc.com/ParolesDeChoristes.htm
    Attention Chorale de Jeunes :
    http://attentionchorale.free.fr/paroles.html

    RépondreSupprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.