L’arrivée de nouveaux
choristes, en ce début de saison, me donne l’occasion de parler d’un phénomène
presque banal mais dont on ne fait quasiment jamais état et qui, du coup, peut
passer largement inaperçu : je veux parler du sens des notes.
Il est fréquent que le
nouveau choriste, encore peu familier du travail choral, soit désarçonné par le
phénomène suivant : après avoir appris chez lui son chant, sa partie de
pupitre, et pensant assez bien la connaître, il lui arrive fréquemment de ne
plus s’y retrouver lorsqu’il doit chanter sa partie parmi les 4 voix de la
polyphonie. Il y a à cela plusieurs raisons, la principale me semblant être la
suivante.
Lorsque l’on apprend la
partie de son pupitre seul, lorsqu’on entend sa mélodie isolée, on lui donne
spontanément un certain sens musical.
Or le fait d’entendre cette mélodie accompagnée d’une, deux ou trois autres
doit conduire, progressivement, à la comprendre d’une façon différente de celle
imaginée au départ, en somme : à l’entendre d’une autre façon. C’est
seulement alors qu’elle prend le sens qui lui convient dans le cadre de l’harmonisation
donnée, de la polyphonie présente. Autrement dit, on ne connaît finalement le
sens précis de toute mélodie, qu’elle soit celle des basses, des ténors, des
alti ou même des soprane, que lorsque l’on arrive à la comprendre en relation
avec les autres voix.
Voilà bien le paradoxe de l’apprentissage du choriste :
celui-ci doit continuellement apprendre et perfectionner seul sa mélodie ;
et pourtant il ne la maîtrisera réellement que lorsqu’il aura bien senti
comment elle s’entend, se comprend, par rapport aux autres. Voilà pourquoi l’apprentissage
repose sur un continuel va-et-vient entre un travail personnel (consolidé par
un travail de pupitre – que l’on pourrait qualifier de monophonique) et un travail du choriste en situation au sein du chœur
et de la polyphonie qu’il produit.
Ce qui est vrai pour la
mélodie est vrai, à plus forte raison, pour chacune des notes qui la
constituent. N’oublions donc jamais que la justesse véritable de chaque note ne
dépend pas seulement de sa place sur la portée, mais qu’on doit la rechercher
dans le sens de la note ; ce
sens n’a a priori rien d’évident ;
il est caché c’est dans la profondeur de la polyphonie elle-même qu’il faut le
chercher.
En fin de compte tout ceci
revient à dire que chaque note d’une mélodie a aussi un sens polyphonique ;
tant que ce sens n’est pas bien saisi, on risque toujours de ne pas chanter la
note très juste. Réciproquement, lorsque notre voix trouve bien sa place dans
le chœur, c’est qu’elle a été guidée par l’équilibre harmonique au sein du chœur.
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